Le 29 novembre 1924, Giacomo Puccini décédait à Bruxelles à l’âge de 65 ans, laissant son opéra Turandot inachevé et une empreinte indélébile dans l’histoire du genre lyrique. L’un des compositeurs d’opéra les plus joués partout dans le monde depuis la fin du XIXe siècle,
son incomparable sens de la mélodie et du théâtre ne cesse jamais d’émouvoir.
L’œuvre de Puccini étant particulièrement chère au cœur du public liégeois et de notre Maison, il était naturel de lui rendre hommage, le jour anniversaire du centenaire de sa disparition, par un concert exceptionnel.
Sa musique inspire, encore et toujours : c’est pourquoi l’Opéra Royal de Wallonie-Liège a commandé une œuvre originale en son honneur au chef d’orchestre et compositeur Andrea Battistoni, déjà entendu sur notre scène lors d’un concert avec la soprano Corinne Winters le 03 juin 2023. Intitulée Pucciniana, il s’agit d’une cantate en cinq tableaux pour soprano, ténor, Chœur et Orchestre qui sera créée sur notre scène le 29 novembre 2024 et éditée par la Maison Sonzogno, éditeur historique des premières oeuvres de Puccini.
Andrea Battistoni a conçu Pucciniana comme une vaste fresque faisant intervenir de savoureux extraits de la correspondance entre Puccini et son éditeur Giulio Ricordi, quelques citations musicales tirées de La Bohème ou Madama Butterfly, mais aussi de nouvelles harmonisations et orchestrations de pièces pour piano et d’ébauches de son projet avorté d’opéra qui aurait été consacré à la reine de France Marie-Antoinette. Donnée en regard d’un florilège d’airs d’opéra, Pucciniana constitue un hommage tout en finesse à un compositeur qui n’a pas fini de nous surprendre !
COUP DE PROJECTEUR
ANDREA BATTISTONI
J’ai composé Pucciniana pour honorer le centenaire de la mort du grand compositeur Giacomo Puccini en 2024. Les oeuvres de Puccini ont toujours été une source d’inspiration inépuisable pour mon activité de compositeur : avec cette pièce, j’ai souhaité dialoguer avec sa musique et son héritage artistique pour leur rendre un hommage sincère, plein d’admiration et de gratitude.
Cette cantate de célébration s’ouvre avec Exordium, une pièce brillante pour Choeur et Orchestre basée sur deux messages plaisants échangés entre l’éditeur Giulio Ricordi et Puccini en 1884, alors que le compositeur travaillait sur La Bohème. En un savoureux latin maccheronico, Ricordi demande des éclaircissements à Puccini sur l’avancée de la composition, et celui-ci le rassure sur l’heureuse suite de son travail.
La Poesia di Rodolfo, sur un texte que j’ai tiré des Scènes de la vie de bohème d’Henri Murger, la source d’inspiration du chef-d’œuvre de Puccini, clôture naturellement ce premier tableau. Dans cette pièce pour ténor et Orchestre ponctuée de citations musicales de La Bohème, j’ai imaginé le poète Rodolfo pleurant la mort de Mimì et la fin de sa jeunesse.
Le deuxième tableau comprend mon orchestration de deux originaux pour piano de Puccini, Foglio d’album et Piccolo Tango, deux joyaux datant vraisemblablement des années 1907-1910, d’où transparaît tout le goût typiquement puccinien pour les mélodies élégantes et les harmonies raffinées. L’on y retrouve le charme d’une musique de salon, que j’ai essayé de traduire fidèlement pour l’ensemble orchestral.
Le troisième tableau, Sogno di Dolore, évoque plutôt la figure du fils de la malheureuse Cio-Cio San, Madama Butterfly. Pour composer cette fantaisie symphonique, j’ai recherché les nombreux thèmes du folklore japonais utilisés dans l’opéra de Puccini et les ai ramenés à leur forme originale, en imaginant de nouvelles harmonisation et orchestration.
Puccini et son fidèle librettiste de confiance ont un temps caressé le projet de composer un opéra sur la figure de la reine de France Marie-Antoinette, avant de l’abandonner en raison du manque d’intérêt du compositeur. Cependant, les ébauches du livret ont survécu, et c’est à partir de celles-ci que j’ai basé mon quatrième tableau, pour soprano, Choeur et Orchestre. Baptisé L’Austriaca. Scena e Aria del carcere, il présente d’abord l’angoisse de la reine déchue et emmenée en prison, vilipendée par un choeur de voix outrageantes, puis un air sur un texte splendide dans lequel le personnage historique de Marie-Antoinette
se mue en diva d’opéra proche de Tosca ou de Manon Lescaut. Pour composer cette musique originale, je me suis basé sur deux indications évoquées par Illica dans ses notes : structurer le début de la scène sur une basse de passacaille, et citer la mélodie de Pauvre Jacques, un air du XVIIIe siècle attribué à Marie-Antoinette elle-même.
La cantate se termine par Apoteosi, un hommage musical au génie du Maestro de Lucques. Après une introduction qui voit alterner, presque comme un collage, quelques réminiscences mélodiques des oeuvres les plus célèbres de Puccini, surgit un thème élégiaque à la mémoire du grand maître qui, après un crescendo de chœur et d’orchestre, se perd et s’évanouit au loin.
Andrea Battistoni